samedi 16 janvier 2010

Article francophone pour RY

La jeunesse russe 20 ans après la chute du mur

La télévision russe offre souvent des images des jeunes. En général, des bandes d'extrême droite chassant étrangers ou sans-logis ou la jeunesse dorée qui fréquente boutiques de luxe et boîtes de nuit branchées de Moscou. Mais on parle peu de l'immense majorité des jeunes Russes confrontés à des problèmes sociaux sans cesse croissants.

Alexander S. Mironov, membre du Comité central du Parti communiste russe des travailleurs – Parti des communistes russes, raconte.

Alexander S. Mironov

La majorité des jeunes Russes est apolitique et s’intéresse peu aux événements politiques du pays. Aux événements internationaux encore moins. Néanmoins, le degré de politisation s’est accru en comparaison avec la période d’Eltsine. Il y a un processus constant, lent et contradictoire de politisation de la jeunesse et de la société. Les moins nantis – les jeunes qui travaillent et les chômeurs – et non les étudiants, ont le plus d’intérêt dans les activités politiques. Ceux qui travaillent ou cherchent un emploi affrontent directement les problèmes sociaux les plus graves auxquels est confrontée la jeunesse. Le mécontentement à propos de la façon dont l’administration locale résout ces problèmes fait en sorte qu’ils ont un degré de confiance dans les autorités bien moindre que celui des étudiants. La division dans la société provoque une réaction de résistance. Et, même si jeunes s’adaptent plus facilement aux nouvelles conditions d'après la chute du mur en 1989, aujourd’hui, la crise affecte directement les jeunes et les encourage à s’impliquer de plus en plus dans la lutte.

Certains jeunes sont attirés vers des courants d'extrême droite mis en place par les autorités. Ces groupes sèment la discorde entre divers groupes ethniques et religieux. La récente « petite guerre victorieuse » en Ossétie a aidé les autorités à renforcer leur image en jouant sur la fibre patriotique de la population. Ils ont utilisé le conflit dans le but d’attiser le chauvinisme et l’hystérie contre les Géorgiens… et de détourner l’attention. La société absorbée par la guerre, le Parlement a alors eu le temps de préparer sans publicité de nouveaux amendements à la législation du travail qui ont détricoté encore plus les droits des travailleurs.

Aujourd’hui, dans l’arène politique et civile russe, une génération monte : celle des gens qui n’ont vécu ou fait des études en URSS, des gens qui ne savent pas de leur propre expérience à quoi ressemblait le pouvoir soviétique. Cette génération a grandi sous l’influence d’un anticommunisme officiel (propagé par les autorités). Dans certaines familles, la génération plus âgée transmet une connaissance objective du socialisme, mais dans un environnement où prévaut officiellement un anticommunisme subtil et raffiné. Même la jeunesse de gauche, qui a grandi sous le capitalisme, a une vision légère de la société socialiste. Entre la génération plus ancienne et la jeunesse, il devient difficile de trouver un langage commun.

Les communistes s'attachent à surmonter ce « conflit des générations » par le travail de l’organisation des jeunes (Komsomol).

Destruction du système d'enseignement

L'Union soviétique était connue pour la qualité de son enseignement. Même l’enseignement supérieur y était gratuit. Aujourd’hui, plus de la moitié des places sont payantes dans les universités. En 2004, le quota fixe des places gratuites dans les universités a été supprimé : il n’y en a plus que 170 par tranche de 10 000 habitants. Une majorité considérable des jeunes s'est ainsi vu interdire l’accès à l’enseignement supérieur de haut niveau.

En 2012, le ministère de l’Éducation prévoit de réduire d’environ 500 le nombre d’universités et de leurs branches (elles sont 3 700 actuellement), en leur refusant la licence d’État pour leurs activités éducatives. D’autres institutions d’enseignement perdront également leur statut universitaire, elles pourront introduire une demande pour former des bacheliers avec des programmes en trois ou quatre années, mais leur financement par l’État sera réduit en proportion, à moins que leur statut ne soit même ramené à celui des écoles techniques. Cela signifie la destruction complète du système d’enseignement russe.

Logement : taux d'intérêt très hauts

La disponibilité des logements décroît rapidement et le système de prêts hypothécaires ne peut empêcher ce phénomène. Si, en Occident, le taux d’intérêt est de 5 à 7 %, en Russie, il est de 10 à 15 %. Donc, en quinze ans, vous devez rembourser les coûts d’un appartement supplémentaire. Depuis la crise, les taux d’intérêt ont encore continué à augmenter. Les emprunteurs potentiels sont de plus en plus pessimistes et, par conséquent, en Russie, depuis octobre-novembre 2008, tout octroi de prêt (tant les prêts à la consommation que les hypothèques) à des personnes physiques a pratiquement cessé. Pour un nombre énorme de jeunes familles, la perspective d’avoir son propre appartement, déjà presque illusoire avant la crise, est devenue totalement irréaliste.

Chômage : 8,5 % de la population active

Depuis mai 2008, le nombre d’emplois vacants permettant aux jeunes de trouver un travail est quatre fois inférieur. Il existe toujours des emplois vacants, mais ils sont beaucoup moins nombreux et on les trouve surtout dans le secteur de l’administration, des ventes et des technologies de l’information. Selon le Service fédéral des statistiques de l’État, à la fin du mois de février 2009, quelque 6,4 millions de personnes étaient recensées comme chômeurs, soit 8,5 % de la population économiquement active. Le ministre de l’Éducation et des Sciences a déclaré qu’au cours des deux prochaines années, la Russie connaîtrait des problèmes d’emploi, y compris pour les diplômés universitaires.

Dans les conditions actuelles, les étudiants et même les jeunes diplômés universitaires subissent la concurrence des spécialistes qualifiés et expérimentés : en raison de la crise, ceux-ci sont nombreux sur le marché et « coûtent le même prix » qu’un jeune pour les entreprises. Depuis six mois, le nombre d’offres d’emploi pour les jeunes diplômés a diminué de 90 %.

Cet article est issu de l’Etude marxiste n°87. Toutes les infos sur www.marx.be

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