vendredi 29 juin 2012

Manifestations anti-austérité au Québec : les policiers accusés de viser au visage avec des balles en plastique

Un reportage de France 24

Une vidéo tournée lors d’une manifestation à Victoriaville (170 km à l’est de Québec) montre un policier pointer une foule avec une arme, puis un manifestant par terre, l’arrière de la tête en sang. Selon les organisateurs, ces images sont la preuve que les forces de la sûreté québécoise (SQ) ont visé les manifestants au visage avec des balles en plastique. L’auteur de la vidéo témoigne.
Vendredi 5 mai, une manifestation à l’appel de plusieurs syndicats et d’organisations de la société civile a rassemblé environ 2 000 personnes à Victoriaville, où se tenait le conseil national du Parti libéral au pouvoir. Menés par la Coalition opposée à la tarification et à la privatisation des services publics, les participants entendaient dénoncer la politique d’austérité du gouvernement, fragilisé par un climat social très tendu.
Depuis plus de trois mois, le pays vit au rythme d’une fronde étudiante sans précédent contre une hausse de 75% des droits de scolarité décrétée par le Premier ministre. Le mouvement contestataire s’est peu à peu étendu aux syndicats qui dénoncent la politique d’austérité menée par le gouvernement. Selon les observateurs, il s’agirait de la mobilisation la plus importante de l’histoire du Québec.
Cette vidéo a été filmée par William Ray qui a expliqué à la presse canadienne avoir filmé trois séquence à quelques seconde d'intervalles. Il dit avoir éteint sa caméra quand le policier a tiré pour porter secours à l'étudiant blessé. Les images ne permettent pas de confirmer que l'étudiant parterre a été touché par un tir policier. 
Comme souvent depuis le début de la contestation, la manifestation de Victoriaville a rapidement dégénéré en violentes échauffourées, la police répondant aux jets de pierre des manifestants par des gaz lacrymogènes. Des deux côtés, de nombreux blessés ont été dénombrés. Mais cette fois, les organisateurs ont dénoncé une "escalade de la répression" de la part des forces de police, les accusant d’avoir mis en danger la vie des manifestants en utilisant, entre autres, des balles en plastique. Trois d’entre eux ont été grièvement blessés vendredi, notamment Alexandre Allard, un étudiant de l’université de Laval victime d’un traumatisme crânien et toujours hospitalisé. Les organisateurs de la manifestation s'appuyent sur une vidéo, qui montre le jeune homme blessé, pour demander l’ouverture d’une enquête.
Sur cette version ralentie de la vidéo, un arrêt sur image (seconde 0'5) permet d'identifier un policier en train de viser quelqu'un avec une arme. Selon les manifestants, un collègue à sa gauche lui indique une cible.
Pour la première fois depuis vendredi, la sûreté du Québec a laissé entendre lors d’une conférence de presse jeudi matin que la blessure pourrait avoir été causée par un projectile utilisé par l’un de ses hommes. Jusque là, la SQ s’était toujours défendue d’être à l’origine des blessures des trois jeunes, dont l’un a perdu l’usage d’un oeil. Le ministre de la Sécurité publique a toutefois fait savoir qu’aucune enquête ne serait ouverte tant qu’il n’aurait pas été établi que la blessure a été causée par un policier.
"Le jeune se tenait debout et regardait la scène sans s’agiter, sans crier ni lancer quoi que ce soit sur les policiers" 

William Ray a filmé la vidéo présentée aux autorités mercredi par la Coalition d’opposition civile pour appuyer sa demande d’ouverture d’une enquête publique.

J’avais remarqué ce jeune homme avant qu’il ne soit à terre. Il se tenait debout et regardait la scène sans s’agiter, sans crier et lancer quoi que ce soit sur les forces de police. Il s’est passé 20 minutes avant que la SQ fasse venir une ambulance. Et pendant ce temps, elle a continué à gazer la zone où était allongé le blessé.
La sûreté du Québec venait de repousser 200 manifestants de l’autre côté d’une rue en les aspergeant de gaz lacrymogènes. Je m’étais posté devant la ligne des forces antiémeutes et j’ai entendu la décharge d’une arme. J’ai tourné la tête et j’ai vu ce jeune homme s’effondrer au sol. Des personnes l’ont transporté plusieurs mètres en arrière. Il avait des spasmes et une grosse blessure derrière l’oreille gauche. Ses yeux étaient ouverts, mais il était inconscient.
Ce billet a été rédigé avec la collaboration de Peggy Bruguière, journaliste à FRANCE 24.

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