lundi 23 mars 2015

Bloquons l’Accord Économique et Commercial Global!

Déclaration du Parti communiste du Canada


Tous les gouvernements, ainsi que toutes les défenderesses et tous les défenseurs des «accords de libre-échange», ont fait miroiter l'illusion de création d'emplois et de prospérité. Ceux-ci ne se sont jamais matérialisés. En effet, c’est le contraire qui s’est produit. Des centaines de milliers d'emplois ont disparu à cause de l'ALENA, et les experts prédisent qu’au moins 50 000 autres emplois seront perdus à cause de l'AECG, le dernier et le plus dangereux de ces accords.

Dans le secret, le gouvernement conservateur d’Harper, l'Union européenne, et les grandes sociétés transnationales ont récemment conclu la ronde finale des négociations du plus important accord de libre-échange de l'histoire du Canada depuis l'ALENA. Bien qu'il y ait eu des contretemps au Parlement allemand concernant le mécanisme de règlement des litiges, le gouvernement Harper continue de faire pression pour obtenir une signature, du moins sur les principes, en Septembre 2014. L'AECG pourrait prendre effet après avoir été ratifié par les États membres de l'Union européenne, ainsi que par les gouvernements fédéral et provinciaux du Canada. Cela établi un calendrier très serré pour bâtir une riposte; tout comme l'AMI (Accord multilatéral d'investissement) qui avait été défait, le blocage de l'AECG demeure encore possible grâce à une stratégie de mobilisation de masse et en faisant de cette trahison une question clé de l'élection fédérale, l'an prochain.


L'histoire de l'Accord Économique et Commercial Global avec l’Europe est une histoire de mensonges, de secret, et de flagornerie des compagnies pour concevoir l'attaque la plus dangereuse contre la souveraineté du Canada et contre la démocratie à ce jour. L'AECG mettra la gouvernance canadienne, tant au niveau fédéral que provincial et municipal, effectivement sous la domination des compagnies canadiennes et européennes. L’AECG va bien au-delà de l'ALÉNA, mais en raison des clauses préférentielles de la na­tion la plus fa­vo­risée de l'ALENA, celui-ci sera mis à niveau selon les standards de l'AECG afin que tout le monde puisse se joindre au festin des compagnies. Ce que les Conservateurs et ensuite les Libéraux n’ont pu vendre avec l'ALENA, sera automatiquement vendu avec l'AECG et les mises à niveau de l'ALENA. Ainsi, les intouchables (selon la croyance populaire) tel que l'eau, les soins de santé et l'approvisionnement sont sur ​​le billot avec l'AECG.

Des fonctionnaires mécontents, tant au Canada qu’en Europe, ont divulgué des informations au public sur les deux continents, qui ont traversé le draconien filet de sécurité, le secret, la désinformation et les scandaleux mensonges perpétrés par les négociatrices et les négociateurs. C'est ainsi que nous savons qu'il y a eu une réunion «seulement sur invitation » convoquée en 2009, où les entreprises canadiennes et européennes ont établi leur « liste de souhaits » en vue d’un accord commercial néolibéral. Si ce n'était des « sonneurs d’alarme », même les parlementaires n'auraient pas eu connaissance de cela. Les nouvelles sont vraiment devenues publiques en 2012, quand on a appris que les négociations duraient depuis des années et étaient apparemment en voie de conclusion. Cela a indigné d'importants secteurs du mouvement ouvrier, des chercheurs progressistes et des ONG, au point où le gouvernement fédéral a été contraint de tenir des audiences factices et recevoir des représentations en Novembre 2013. Les auteurs des mémoires ont été contraints de d’appuyer leurs exposés sur des ouï-dire, sur des documents gouvernementaux sommaires préparés pour cette fin, et sur des fuites de documents. Dans le cadre de cette farce, ils ont été entendus par un gouvernement qui savait tout mais officiellement n’admettait rien. Néanmoins, les représentations ont pu démontrer quelques-uns des dangers intrinsèques.

Très tôt dans les négociations, l'UE a fait du plein accès aux marchés publics une question fondamentale et incontournable de l’accord. Ils ont obtenu ce qu'ils voulaient. Les marchés publics ont peu à voir avec le commerce, mais tout à voir avec l'accès des entreprises à tous les niveaux des dépenses publiques jusque dans les conseils municipaux, les conseils scolaires, etc. Bien que le gouvernement affirme que les soins de santé ne soient pas en danger, ils le sont certainement. L'existence actuelle des PPP, les intégrations complexes de services publics / privés et les établissements de soins de longue durée, donnent amplement de munitions aux mécanismes de traitement des plaintes des compagnies. Sous l'AECG, aucun gouvernement ou organisme public ne sera en mesure de développer des politiques d'approvisionnement qui favoriseraient des fournisseurs locaux ou régionaux dans le but de promouvoir l'emploi ou le développement local. Toute municipalité et tout organisme public devra soumettre ses politiques et ses plans d'approvisionnement au gouvernement fédéral, et ceux-ci seront accessibles à toutes les compagnies. Toute compagnie pourra remettre en question les pratiques en tant qu’avantage injuste, et aura la capacité de porter des accusations qui ne seront pas entendus devant des tribunaux canadiens, mais devant un tribunal international non encore déterminé et composé de personnes qui ne le sont pas davantage.

L'eau du Canada sera à l'agenda des compagnies si elle a déjà été commercialisée. Cela signifie, par exemple, que n’importe eau en bouteille qui provient d’une ressource publique et qui est vendue commercialement, fournira les conditions pour qu’elle soit privatisée et commercialisée. L’AECG va privatiser l'eau potable (y compris les services publics municipaux comme les égouts et l'assainissement des eaux) en couvrant en détail ces éléments pour la première fois dans des négociations commerciales canadiennes.


L’AECG aura pour effet de supprimer la capacité démocratique des municipalités, des conseils scolaires, des hôpitaux, des universités, des organismes provinciaux et sociétés d'État, ainsi que des peuples du Québec et autochtones, d’utiliser leurs pouvoirs d'achat pour stimuler l'emploi local et la prospérité. L’AECG va nous engager dans une privatisation partielle et/ou complète des services publics de l'eau, rendant pratiquement impossible la reprise en main par le secteur public de ces services. Il va forcer la privatisation d'autres services publics tels que les magasins d'alcool et Postes Canada.

L’AECG va permettre aux compagnies de s’introduire dans la mine d'or de l'éducation post-secondaire, et de menacer l'intégrité des programmes de recherche, en leur permettant de poursuivre les étudiantes et les étudiants qui dénonceraient des pratiques contraires à l'éthique de recherche.


L’AECG va s’attaquer aux droits des peuples autochtones conférés par les traités, à leur souveraineté et à leur droit à l'autodétermination, à cause de la portée très vaste de l'accord qui donne aux industries étrangères l'accès aux territoires et à l’eau des Premières nations, des Inuits et des Métis.

Dans tous ces accords, des clauses préférentielles dites de «nation favorisée» fournissent une méthode diabolique de mise à niveau de l'état et des conditions de l’entente pour chacune des parties, à celui de la dernière négociée. Aussi mauvais l'AECG puisse-t-il être, les négociations actuellement en cours entre les États-Unis et l'UE sur le «Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement» va assurer des mises à niveau pour le Canada sans qu’il soit partie prenante des négociations.


Ce n'est pas un secret que le Canada exporte principalement des matières premières vers l'Europe qui en retour vend principalement au Canada des produits finis, à valeur ajoutée. Cela a créé un extraordinaire déficit commercial de 28 milliards $ avec l'UE. Ce déficit ne peut que s'aggraver si nous rendons plus facile (et moins cher) pour les entreprises européennes d'expédier les produits finis au Canada, et plus facile (et moins cher) pour les entreprises canadiennes d’expédier des ressources en Europe.


Une partie du résumé du mémoire qu’Unifor a soumis aux audiences de Novembre 2013 contient ce qui suit: «Nous sommes en train d’octroyer des droits à des investisseurs et à des compagnies privées qui sont du jamais vu. Nous sommes en train d’octroyer aux investisseurs et aux compagnies privées le droit de contester les décisions politiques démocratiques prises par nos gouvernements nationaux et sous-nationaux, si ces décisions portent atteinte à leur droit de faire des profits. Qu’en est-il du droit des travailleuses et des travailleurs d’avoir des emplois décents? Qu’en est-il du droit des citoyennes et des citoyens à prendre des décisions démocratiques? »


Pourquoi un gouvernement canadien quel qu’il soit pourrait-il négocier l'abandon de la souveraineté, céder les pouvoirs législatifs et judiciaires à une clique de représentants d'entreprises internationales, mettre les gouvernements municipaux et provinciaux sous la juridiction de compagnies étrangères, et priver les Canadiennes et les Canadiens du pouvoir de prendre des décisions dans leurs propre pays? Parce que l'AECG aura pour effet de mettre en œuvre le programme néolibéral de privatisation sans qu’il y ait nécessité de décision parlementaire. Le gouvernement Harper va pouvoir ainsi accomplir le programme des compagnies par le truchement d'un accord commercial qui aura été négocié en secret et qui sera un fait accompli avant même que qui que ce soit, y compris les membres du parlement, ait pu en voir un manuscrit complet. Les partis d'opposition, et en particulier le NPD, se sont déshonorés dans leur soutien à ce qui est essentiellement un acte de trahison. Il y a eu une certaine opposition de la part du mouvement ouvrier, mais les dénonciations et l’opposition la plus importante est venue de forces comme le Centre canadien de politiques alternatives, le Conseil des Canadiens, les mouvements sociaux au Québec, les municipalités, les organisations de soins de santé, les organisations environnementales et les Premières nations.


Le Parti communiste a été profondément engagé dans les luttes contre tous les accords commerciaux passés, de l'ALE à l'ALENA et d'autres, et nous continuons de faire partie de ce combat crucial. Nous appelons à la formation urgente d'un bloc de résistance du mouvement ouvrier du Canada anglophone et du Québec, des Premières nations, des groupes environnementaux et des groupes de femmes, des mouvements sociaux, des partis politiques et des organismes municipaux, pour informer le public des dangers, et pour formuler une riposte d'urgence afin d’arrêter cette dangereuse trahison.

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